https://iclfi.org/pubs/lb/238/syrie
Traduit de Workers Hammer n° 255 (hiver 2025), journal de nos camarades de la Spartacist League/Britain.
Des scènes de liesse ont éclaté après l’effondrement du régime détesté de Bachar Al-Assad. Si le dictateur a disparu, nombreux sont ceux qui craignent pour l’avenir. Les expériences de la Libye, de l’Irak et de l’Afghanistan montrent que la chute d’un régime détesté ne conduit pas automatiquement au progrès. Dans le cas de la Syrie, même les observateurs les plus optimistes doutent que les promesses démocratiques du nouveau gouvernement dirigé par Hayat Tahrir Al-Cham (HTC), une milice islamiste affiliée à l’origine à Al-Qaida, soient vraiment fondées. Comment réaliser des avancées démocratiques et sociales dans la situation actuelle ? Telle est la question cruciale à laquelle sont confrontées les forces progressistes et ouvrières en Syrie aujourd’hui.
Certains croient naïvement que la voie du progrès démocratique passe par l’allègement des sanctions imposées par les États-Unis et l’Union européenne et leur remplacement par de l’aide. Il s’agit là d’une dangereuse illusion. Les puissances impérialistes occidentales sont responsables de l’enlisement de la Syrie et de toute la région dans un conflit perpétuel. Leur rhétorique sur la démocratie et les droits civiques n’a jamais été qu’un mince vernis pour dissimuler leurs véritables intérêts : s’assurer qu’aucun État ou coalition ne puisse arrêter le pillage des ressources de l’Asie occidentale.
Encore et encore, ils ont suivi la même politique de diviser pour régner, en utilisant les intérêts à court terme d’une faction religieuse ou nationale pour fomenter des conflits plus larges et maintenir la région divisée intérieurement. Ce n’est pas un secret, et il devrait être évident que le progrès social au Moyen-Orient ne se fera qu’aux dépens des États-Unis et de leurs chiens de guerre sionistes. Mais la réalité est toujours plus compliquée que la théorie. Le problème est qu’avec une région aussi divisée intérieurement et aussi pauvre, il y a toujours un ennemi qu’on peut présenter comme un plus grand danger immédiat qu’une puissance étrangère lointaine.
C’est ce qui a rendu le conflit syrien si insoluble. Les cliques nationales corrompues et les acteurs étrangers exploitent les aspirations, les craintes et les griefs légitimes de certains secteurs de la population pour promouvoir leurs propres intérêts réactionnaires. L’oppression des Kurdes par de nombreux États de la région est utilisée par les États-Unis et par Israël. La haine d’Assad et de l’oppression occidentale est utilisée par diverses forces islamistes sunnites. Quant à Assad, un des piliers de son régime était la crainte légitime des alaouites et d’autres minorités de subir des représailles pour l’oppression qu’ont historiquement endurée les musulmans sunnites.
Pour unir les peuples de Syrie et engager véritablement la région dans la voie du progrès, il ne suffit pas de crier à tous vents des platitudes démocratiques et socialistes. Il est nécessaire de proposer un programme capable de dénouer les sacs de nœuds sectaires et de regrouper les forces véritablement révolutionnaires et progressistes en surmontant les divisions religieuses et nationales. Cela ne se fera pas en soutenant la force qu’on estime la moins réactionnaire à un moment donné. Il s’agit plutôt de séparer les impulsions progressistes de chaque faction – alaouite, sunnite, arabe, kurde, etc. – des forces réactionnaires qui exploitent ces impulsions pour servir leurs propres intérêts. Ce n’est pas la voie la plus facile, mais c’est la seule qui offre un avenir aux peuples de Syrie et de la région.
Le régime réactionnaire baasiste
En 2011, des manifestations ont éclaté dans toute la Syrie. Elles étaient l’expression des aspirations démocratiques d’une population qui vivait sous la dictature dynastique de la famille Assad depuis 1970. La réponse du régime fut une vague de répression brutale, qui transforma progressivement le mouvement de protestation en guerre civile. Pour comprendre cette évolution, il est nécessaire d’examiner les caractéristiques fondamentales du régime baasiste dirigé par Bachar Al-Assad.
Le Parti baas syrien reposait sur le projet panarabe d’unir les différents peuples de la région derrière un projet national modernisateur commun. Le régime avait parfois pris une coloration socialiste, en nationalisant de larges pans de l’industrie. Toutefois, comme dans de nombreux pays arabes et musulmans, la base sociale du régime reposait essentiellement sur les officiers supérieurs de l’armée et les cercles étroits d’une élite commerciale cosmopolite. Si ces couches incarnent d’une certaine manière des aspirations progressistes à la laïcité et à la modernité, leurs intérêts de classe sont au bout du compte étroitement égoïstes et s’opposent à ceux de la masse appauvrie de la population. En fait, l’anti-impérialisme des Assad a toujours été très mince : ils sont intervenus dans la guerre civile libanaise avec l’approbation tacite des Américains et des Israéliens, ils se sont joints à la guerre du Golfe en 1991 et ils ont collaboré à la « guerre contre le terrorisme » de Bush pendant les premières années.
Étant donné que les régimes comme celui d’Assad se cachent derrière de belles promesses laïques et même socialistes pour opprimer leur peuple, l’opposition à ces régimes se cristallise généralement en suivant les lignes de fracture religieuses et communautaires plutôt que les divisions de classe. Ce fut le cas lors du Printemps arabe de 2011, où les révoltes populaires qui avaient débuté dans les centres urbains contre les dictatures en Tunisie, en Égypte, en Syrie et ailleurs ont de plus en plus pris la forme d’une lutte religieuse menée par les masses sunnites opprimées contre les élites militaires laïques. En Syrie, cette dynamique a été aggravée par le fait que le régime d’Assad avait comme base étroite la secte religieuse alaouite. Or celle-ci ne représente qu’une toute petite partie de la population syrienne, qui est composée à plus de 70 % de sunnites.
Cela signifie que lorsque des manifestations ont éclaté, Assad ne pouvait compter que sur une très petite base de soutien au sein de la société. Pour maintenir son emprise sur le pouvoir, il ne pouvait utiliser que les éléments de l’armée syrienne dont la loyauté était incontestable. Ainsi, au fur et à mesure que le mécontentement se répandait, les forces gouvernementales ont eu recours à des tactiques de plus en plus sanglantes, qui permettaient d’économiser les hommes. Les troupes du régime bombardaient massivement les zones urbaines, en prenant particulièrement pour cibles les quartiers sunnites. Ces actions, ainsi que l’ingérence des puissances étrangères, ont activement contribué à transformer le soulèvement populaire en une guerre civile intercommunautaire.
Il est indéniable que les États-Unis et leurs alliés ont cherché à subvertir et finalement à renverser le gouvernement syrien. Non seulement ils ont imposé à ce pays des sanctions économiques écrasantes, mais ils ont également armé, entraîné et financé différents groupes rebelles. Les défenseurs du régime d’Assad invoquent ces faits pour le soutenir comme un moindre mal par rapport aux forces communautaires pro-impérialistes qui constituaient la rébellion.
Il était certes nécessaire de s’opposer à l’agression de l’impérialisme occidental contre la Syrie. Mais le régime ne menait à aucun moment une guerre de défense nationale contre l’impérialisme, et il n’était pas dans l’intérêt de la classe ouvrière de le défendre. Malgré les prétentions panarabes du régime baasiste, celui-ci n’a jamais constitué un véritable gouvernement national. La guerre qu’il menait n’avait pas pour but d’unifier le peuple arabe contre l’agression étrangère. Il s’agissait toujours au contraire d’une guerre visant à maintenir au pouvoir une petite clique corrompue de loyalistes d’Assad reposant sur les alaouites. Au fond, plus que l’argent, les armes ou les sanctions, ce sont les bases communautaires et dictatoriales du régime qui ont miné et finalement conduit à l’effondrement d’un gouvernement syrien centralisé.
En opprimant les Arabes sunnites et les Kurdes, en déniant les droits démocratiques fondamentaux et en s’accaparant les richesses du pays, le régime d’Assad a ouvert la voie aux impérialistes et aux puissances régionales qui ont profité de la situation et poursuivi leurs propres objectifs réactionnaires. Il ne fallait pas défendre le régime, car il ne contribuait pas à la défense de la Syrie contre le pillage impérialiste, mais la sapait. Quant aux interventions de la Russie et de l’Iran en faveur d’Assad, elles étaient intéressées et réactionnaires, et non anti-impérialistes.
Nombreux sont ceux qui, en Syrie et dans le monde, ont soutenu le régime d’Assad non par vénalité, mais parce qu’ils le considéraient comme le seul rempart contre la réaction religieuse et le démembrement de la Syrie. De nombreux alaouites et membres d’autres minorités ont soutenu le régime non pas par amour pour Assad, mais parce qu’ils craignaient d’être la cible de vengeances s’il perdait son emprise sur le pouvoir. Il était et il reste nécessaire de montrer à ces couches de la population que l’unification nationale, la sécurité à long terme des minorités ainsi que le progrès social et démocratique ne pouvaient se réaliser qu’en opposition au régime baasiste. D’autres, dont le Hezbollah, ont aidé militairement le régime parce qu’ils craignaient les conséquences qu’aurait son effondrement pour la lutte contre Israël. Pour ces éléments, il faudrait démontrer que les divisions communautaires exacerbées par Assad ont affaibli cette lutte régionale.
Tout cela montre que la tâche n’était pas de défendre la tyrannie d’Assad, mais de la renverser d’une façon progressiste. Mais ce n’est manifestement pas ce qui s’est passé.
L’échec de la révolution démocratique
Comment le mouvement contre Assad, qui avait commencé comme un soulèvement spontané pour les droits démocratiques, s’est-il retrouvé de plus en plus dominé par des forces islamistes réactionnaires et est-il devenu un terrain de jeu pour les puissances étrangères ? Nous avons déjà vu comment le régime d’Assad lui-même a contribué à cette évolution. Mais ce n’est que la moitié de l’histoire. Pour avoir une vue d’ensemble, il est également nécessaire d’examiner les dynamiques et les échecs au sein de l’opposition et des différents groupes rebelles.
Dans les pays gouvernés par des dictatures en conflit avec l’Occident, les progressistes ont fortement tendance à considérer les démocraties impérialistes comme un contrepoids. L’exemple de la guerre civile syrienne montre à quel point cette erreur est fatale. Au fond, c’est avant tout la foi dans la démocratie occidentale qui explique pourquoi Assad a finalement été renversé par des forces islamistes obscurantistes plutôt que par un mouvement représentant les aspirations démocratiques révolutionnaires qui avaient initialement provoqué le soulèvement des peuples de Syrie.
Quand Assad a déployé ses forces de sécurité pour écraser brutalement le mécontentement, des milices locales ont vu le jour pour défendre des communautés. Finalement, les défections ont commencé à se multiplier au sein des forces gouvernementales. Tout au long de la guerre civile, les socialistes et les travailleurs devaient défendre les communautés menacées d’être massacrées. Cependant, ce qui avait commencé comme des mouvements héroïques d’autodéfense s’est finalement transformé en une campagne militaire contre le gouvernement, subordonnée aux intérêts des impérialistes occidentaux. Non seulement cela a entraîné un désastre militaire, mais c’était aussi la trahison de tout espoir de révolution démocratique et sociale en Syrie.
Un rapport publié en 2016 par Félix Legrand, membre du groupe de recherche « Initiative de réforme arabe », détaille certaines des raisons de la marginalisation de l’Armée syrienne libre (ASL), la principale force rebelle dans la phase initiale de la guerre civile. La première chose que ce rapport note (sans pouvoir l’expliquer), c’est comment la fragmentation politique a paralysé l’ASL. En effet, l’ASL représentait deux forces contradictoires. D’un côté, les aspirations populaires au progrès démocratique et social, et de l’autre, les intérêts de puissances étrangères.
En raison de sa subordination à l’impérialisme, l’ASL n’a jamais été en mesure d’unir les travailleurs syriens dans une lutte commune contre les intérêts économiques de l’élite et pour la démocratie. Après tout, les États-Unis et leurs alliés sont tous absolument opposés à l’émergence d’un État syrien fort et démocratique – et encore plus d’un État syrien socialiste. Ainsi, le programme démocratique de l’ASL était en fin de compte incohérent et n’existait que sur le papier. En revanche, les forces islamistes et kurdes pouvaient s’unir autour d’un projet commun, religieux pour les premières, national-démocratique pour les secondes.
Dans la conclusion de son rapport, M. Legrand note que :
« Pour l’ASL, c’est précisément son incapacité à résister aux bailleurs de fonds étrangers et à développer une certaine influence sur les décisions qui lui sont imposées qui l’a poussée en marge des champs de bataille. »
Effectivement, au fur et à mesure que la guerre civile évoluait, il est devenu de plus en plus évident que l’ASL ne représentait pas un mouvement de libération du peuple syrien, mais qu’elle était un outil de Washington. Cela s’est manifesté très clairement par le fait qu’elle a été contrainte à plusieurs reprises de cesser les hostilités contre Assad pour prioriser des intérêts plus pressants pour les États-Unis, qu’il s’agisse de la lutte contre Daech ou de la sécurisation de la frontière jordanienne.
Cette soumission docile a été dénoncée à juste titre comme une trahison par les forces islamistes, et elle a contribué à des défections massives des combattants de l’ASL. Au fil de la guerre civile, l’ASL a été progressivement marginalisée, et les forces islamistes sont de plus en plus devenues la seule véritable opposition militaire à Assad.
Quelle était alors la voie à suivre pour ceux qui espéraient une révolution sociale et démocratique en Syrie ? Continuer à soutenir l’ASL « démocratique » et faire pression pour obtenir davantage de soutien de la part de l’Occident ? Non. Le soutien apporté par l’Occident ne vaut jamais le prix de la soumission politique exigée en retour. Il était encore moins correct d’appeler à une intervention militaire directe, comme beaucoup l’ont fait. Cela aurait signifié l’asservissement de la Syrie par l’impérialisme, une issue encore pire que celle à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui. Qu’en est-il des forces islamistes ? Fallait-il les soutenir en tant que seules forces menant objectivement la lutte contre Assad ? Évidemment non. Leur victoire ne représente pas plus un progrès que le maintien au pouvoir d’Assad. Ceux qui en doutent s’en rendront compte bien assez tôt.
Ce qui était nécessaire, mais qui a manqué pendant tout ce conflit, c’était une véritable lutte au sein des forces démocratiques pour une rupture totale avec la subordination aux États-Unis. Accepter des armes là où on peut les obtenir est une chose, mais devenir l’esclave des puissances les plus réactionnaires du monde en est une autre. Une opposition claire et de principe aux États-Unis et à leurs affidés aurait permis de faire de la lutte contre Assad un élément constitutif de la libération de l’ensemble de la région de l’impérialisme. D’une part, cela aurait réduit l’attrait du régime, qui se présentait comme le seul défenseur de l’indépendance nationale syrienne. D’autre part, cela aurait contribué à faire du conflit un véritable soulèvement démocratique et national, en fournissant la base nécessaire pour polariser et diviser les différentes factions communautaires et religieuses.
En fin de compte, la principale leçon à tirer est que ce n’est qu’en s’opposant aux États-Unis et à Israël qu’une solution radicalement démocratique et socialiste pourra émerger en Syrie.
La question kurde
Pour beaucoup, notamment au sein de la gauche en Türkiye et en Europe occidentale, les forces kurdes dirigées par les Unités de protection du peuple (YPG) représentent une véritable alternative révolutionnaire et démocratique dans la guerre civile syrienne. Il est vrai que le soulèvement national démocratique au Rojava avait le potentiel d’être un véritable phare pour la libération nationale et le progrès social dans toute l’Asie occidentale. Cependant, tout comme l’ASL, les forces kurdes regroupées au sein des Forces démocratiques syriennes (FDS) se sont inféodées aux États-Unis et ont donc joué un rôle généralement réactionnaire.
C’était une chose d’accepter l’aide des États-Unis et de se retrouver dans une alliance objective face à une menace d’extermination ethnique. Ce fut le cas lors du siège de Kobané par les forces de Daech en 2014. Et c’était une absurdité stérile et réactionnaire de refuser à un peuple les moyens de se défendre comme il le peut dans une telle situation1. En revanche, lancer une offensive conjointe avec les troupes américaines dans des territoires habités très majoritairement par des Arabes, comme l’ont fait les FDS, c’est une tout autre affaire.
Bien sûr, Daech représentait une force extrêmement réactionnaire et constituait une menace pour toutes les minorités religieuses et nationales de la région. Toutefois, sa force résidait avant tout dans l’oppression brutale des sunnites à la suite de l’invasion américaine en Irak. La défaite militaire de Daech n’a pas permis de s’attaquer à la racine du problème. Bien au contraire, la dévastation à grande échelle de villes comme Raqqa par les États-Unis, avec l’aide des forces kurdes, ne fera qu’attiser le ressentiment.
Alors qu’elles étaient un phare potentiel pour la résistance révolutionnaire anti-impérialiste, les YPG et les forces kurdes sont désormais considérées par beaucoup dans la région comme des agents des États-Unis. Par exemple, elles sont directement responsables du pillage du pétrole syrien au profit des Américains. Rien ne montre mieux la faillite des dirigeants kurdes que leur façon d’éviter la question du génocide des Palestiniens à Gaza pour ne pas déplaire à leurs alliés. Le mouvement national kurde a brillé par son absence dans la lutte internationale contre Israël depuis le 7 Octobre, et il a récemment entamé un dialogue diplomatique avec Tel-Aviv. Alors que la question palestinienne pourrait être le pont parfait pour unir la cause des Kurdes à celles du reste de la région, y compris en Türkiye, l’absence d’action concrète des organisations de gauche kurdes en défense de la Palestine isole une fois de plus les Kurdes, les rendant ainsi plus vulnérables à de futures attaques et plus dépendants des États-Unis.
Il est urgent que le mouvement national kurde rompe son alliance avec les États-Unis, dans les termes qu’il décidera. C’est essentiel non seulement pour la libération de toute la région des griffes de l’impérialisme américain, mais aussi pour la libération nationale et sociale des Kurdes eux-mêmes en Syrie et au-delà.
Et maintenant ?
L’effondrement du régime d’Assad a créé un vide et une ouverture pour le débat politique. Cette occasion favorable ne durera probablement pas très longtemps, et il faut la saisir pour organiser la lutte contre le nouveau régime et provoquer un réalignement politique. Ce qui a manqué pendant toute la guerre civile, c’est une alternative véritablement anti-impérialiste, démocratique et socialiste. La tâche à laquelle nous sommes confrontés est de construire une telle alternative, en tirant les leçons de la guerre civile.
Tout d’abord, ce n’est qu’en s’opposant à l’oppression impérialiste dans toute la région que nous pourrons commencer à unir les peuples d’Asie occidentale. Les travailleurs et les paysans de Türkiye, du Kurdistan, de Syrie, d’Iran, du Liban, de Palestine et d’Irak sont tous opprimés par le système international dirigé par les États-Unis. Le point de départ doit être de s’opposer à la prédation économique et militaire des États-Unis et de leurs alliés, notamment d’Israël qui étend ses conquêtes dans le sud de la Syrie et du Liban.
Deuxièmement, une véritable unité contre l’oppression étrangère ne peut être réalisée qu’en reconnaissant les droits démocratiques des minorités religieuses et nationales. Les impérialistes ont conçu la région pour diviser sa population ; seule une véritable autodétermination peut guérir ces blessures. Nous devons lutter pour une Palestine et un Kurdistan libérés de l’oppression nationale. Nous devons lutter contre l’imposition de la religion par l’État et pour l’émancipation des femmes.
Enfin, s’il est une chose que la guerre civile syrienne et le conflit palestinien ont montrée, c’est que l’élite dirigeante du monde arabe et musulman est constituée de traîtres corrompus qui sacrifieront la libération de leur peuple pour des gains économiques ou politiques à court terme. Toute lutte pour la démocratie et la libération de l’impérialisme sera menée contre cette classe sociale, aussi anti-impérialiste qu’elle puisse paraître à un moment donné. L’avenir du Moyen-Orient et de la Syrie est entre les mains des travailleurs, et non des élites. Unissons-nous contre l’impérialisme américain et ses laquais – pour une fédération socialiste de l’Asie occidentale !
1. Cette approche erronée a été celle de la LCI dans sa couverture de la bataille de Kobané et de l’ensemble de la guerre civile syrienne. Le présent article se veut une correction, conformément à notre réorientation plus générale. Voir « En défense de la révolution permanente », Spartacist édition en français n° 46, novembre 2023.