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La motion imprimée ci-dessous témoigne de la dure bataille interne qu’a dû mener notre organisation pour corriger notre capitulation initiale à l’unité nationale au début de la pandémie. La motion a été adoptée lors d’une réunion du comité central de la Ligue trotskyste au Québec et au Canada pour faire appliquer le cadre programmatique de notre déclaration internationale « À bas les confinements ! » (reproduite ci-haut), publiée trois mois auparavant. Entre le début de la pandémie et l’adoption de cette motion, la direction de la Ligue trotskyste avait adopté trois autres motions qui soutenaient directement les confinements ou mettaient de l’avant une critique libérale de ceux-ci. En répudiant ces trois motions, la motion ci-dessous a établi clairement que ce qui définit notre position marxiste dans la pandémie ce n’est pas seulement de s’opposer aux confinements, mais de s’y opposer sur la base d’un programme faisant avancer la lutte pour la révolution socialiste ; elle explique les tâches centrales que cela soulève pour les révolutionnaires.

Motion : La première motion du BP [bureau politique] adoptée le 18 mai 2021 défend la motion libérale du 24 mars 2020 qui soutenait les confinements et capitulait à l’unité nationale. Il n’y a aucune distinction de principe entre les motions du 24 mars 2020, du 1er juillet 2020 et du 18 mai 2021 : toutes trahissent la classe ouvrière. Que ce soit en ciblant certaines ou l’ensemble des mesures des gouvernements, la LTQC a toujours mis de l’avant une critique libérale des confinements ; soit parce qu’ils sont répressifs ou des « mesures de santé publique réactionnaires ». Le caractère décisif de notre opposition aux confinements c’est qu’elle est basée sur un programme révolutionnaire de lutte de classe indépendante contre la bourgeoisie et l’unité nationale. S’opposer aux confinements sur toute autre base que celle-ci, c’est défendre un programme bourgeois qui cherche à réconcilier les antagonismes de classe plutôt que d’utiliser la crise pour faire avancer la lutte pour le renversement de la bourgeoisie.

En critiquant les confinements d’un point de vue libéral, la LTQC rejetait les bases mêmes qui font du soutien aux confinements une trahison de classe. Il n’est pas suffisant de simplement noter que les dirigeants ouvriers ont trahi les travailleurs en leur faisant avaler les confinements, ce qui est parfaitement compatible avec une critique libérale des confinements. La ligne de principe c’est que le soutien aux confinements signifie la subordination complète du prolétariat à ses ennemis de classe et la collaboration avec la bourgeoisie dans ses attaques dévastatrices durant la pandémie. La direction de la LTQC capitulait aux directions du mouvement ouvrier en les critiquant sur tout sauf leur crime principal durant la pandémie. La seule manière pour le prolétariat de défendre ses intérêts vitaux passe par sa lutte indépendante contre la bourgeoisie, ce que les confinements entravent à tous les niveaux. Toute prétention des réformistes de lutter pour ceci ou cela qui serait dans l’intérêt de la classe ouvrière est hypocrisie et mensonge s’ils supportent et plaident pour davantage de confinements. Les exposer pour ce crime doit être notre point de départ dans le contexte de la pandémie.

Depuis le début de la pandémie, la LTQC a rejeté la position marxiste élémentaire que les intérêts du prolétariat sur les questions de santé publique — comme sur toute autre question — sont directement opposés à ceux de la bourgeoisie et irréconciliables avec eux. La condition préalable d’un programme prolétarien dans la pandémie c’est d’exposer et de rompre avec le mensonge qu’utilisent la bourgeoise et ses lieutenants ouvriers pour subordonner les intérêts de la classe ouvrière, soit que « sauver des vies » est une cause universelle qui transcende les intérêts de classe. La direction de la LTQC a continuellement capitulé à la propagande bourgeoise qui dicte que la lutte de la classe ouvrière pour ses intérêts tuerait des gens. Cette capitulation s’exprime dans un soutien tacite ou ouvert aux confinements, mais aussi dans la position défendue par les camarades que s’opposer aux confinements signifie sacrifier les intérêts de santé immédiats du prolétariat au nom de la révolution socialiste future. La défense des besoins immédiats du prolétariat en matière de santé est inséparable de la lutte contre les confinements et pour la révolution socialiste.

Tout au long de la pandémie, le programme de la LTQC enchaînait les travailleurs à l’État capitaliste, nourrissant l’illusion que l’État est là pour « protéger les gens » et qu’il est une instance « neutre » au-dessus des antagonismes de classe. D’abord, en soutenant les confinements. Ensuite, en se limitant à des critiques sociales-démocrates de l’État, par exemple que le problème avec l’État est le sous-financement des services publics ou ses « politiques répressives ». L’implication est qu’avec des politiques différentes ou des réformes radicales, l’État capitaliste peut être mis au service des travailleurs. L’autre côté de cette même politique c’est de nier que l’État puisse faire quoi que ce soit qui coïncide avec les intérêts de la classe ouvrière (par exemple la position incorrecte argumentée par un camarade de s’opposer à la PCU). C’est penser que des réformes soutenables invalideraient le programme marxiste sur l’État. La ligne fondamentale entre réformisme et marxisme ne consiste pas dans la possibilité que la bourgeoisie puisse faire des réformes ou prendre des mesures soutenables pour la classe ouvrière — ce qu’elle fait toujours selon ses propres intérêts. L’État est un appareil de violence pour maintenir la domination capitaliste sur la classe ouvrière ; celle-ci ne peut s’appuyer sur cet appareil pour défendre ses intérêts, mais doit briser la machine d’État bourgeois et instaurer la dictature du prolétariat. Là est la ligne de principe entre léninistes et sociaux-démocrates.

En poussant un programme bourgeois en opposition à la déclaration du CEI sur tous les aspects déterminants — les confinements, l’unité nationale, l’État — le BP a nécessairement capitulé aux forces mêmes qui poussent la collaboration de classe dans le prolétariat au Québec et au Canada : la social-démocratie anglochauvine au Canada et la bureaucratie syndicale nationaliste au Québec. La tâche centrale pour la LTQC, c’est de mener une lutte acharnée contre la subordination du prolétariat à la bourgeoisie par les dirigeants traîtres du mouvement ouvrier. Leur trahison dans le contexte de la pandémie pose de manière brûlante la nécessité de rompre avec ces directions et de forger un parti révolutionnaire binational qui lutte pour la libération nationale du Québec et le socialisme.