https://iclfi.org/pubs/lb/2025-iran
Nul ne sait combien de temps durera le cessez-le-feu décrété par Trump hier matin, mais l’Iran reste la cible de l’État sioniste et des États-Unis. Ces derniers cherchent à faire plier le régime et ramener le pays à l’état de vassal docile qu’il avait été du temps du chah, un monarque sanguinaire. Il est du devoir des prolétaires et des opprimés du monde de prendre position du côté de l’Iran, tout comme de la Palestine : si les impérialistes américains parviennent à leurs fins ce sont tous les peuples opprimés et les travailleurs du monde entier, y compris dans les centres impérialistes, qui se retrouveront encore plus accablés d’attaques. Si les travailleurs français ne se mobilisent pas, c’est eux-mêmes demain qui paieront la note d’une arrogance accrue de l’impérialisme français, et même peut-être en qualité de chair à canon des impérialistes occidentaux.
Evidemment il n’y a rien à attendre du PS ou du PCF : ils se sont joints tous deux à de multiples campagnes diffamatoires contre la France insoumise parce que celle-ci fait des déclarations de soutien au peuple palestinien contre le génocide sioniste et en défense de militants ciblés par l’État. Mais LFI elle-même est aussi un obstacle à la lutte. Après les frappes américaines contre les sites nucléaires iraniens, LFI a appelé le gouvernement à condamner « sans détour cette attaque, se désengager de toute alliance avec ces fauteurs de guerre et en appeler à une réunion d’urgence du conseil de sécurité de l’ONU et de son assemblée générale » (lafranceinsoumise.fr, 22 juin). Ces appels présentant l’impérialisme français et l’ONU, émanation de l’hégémonie américaine (et qui avait solennellement créé l’État sioniste en 1947), comme des agents potentiels de la paix entre les peuples ne peut que démobiliser la lutte anti-impérialiste.
De même, la CGT se félicite de l’action ponctuelle des dockers de Fos, qui ont symboliquement sauvé l’honneur du prolétariat français en bloquant une livraison de matériel militaire à Israël, mais dans le même temps elle sabote ce genre d’action en propageant des illusions dans l’impérialisme français et l’UE, les engageant à « faire respecter le droit international et privilégier les voies diplomatiques pour garantir la paix et la sécurité dans cette région » (déclaration du 23 juin).
Révolution permanente est la seule organisation d’extrême gauche à part nous qui, à son crédit, a pris position pour la défense de l’Iran en appelant les travailleurs « à défendre l’Iran en toute indépendance du régime des ayatollahs » (éditorial de son comité de rédaction, 16 juin). Nous sommes tout à fait d’accord ! Camarades de RP : les déclarations platoniques sur internet ne suffisent pas ; nous devons nous battre pour une voie de lutte prolétarienne anti-impérialiste opposée notamment à la France insoumise et à la bureaucratie syndicale dans nos déclarations, lors des manifestations contre la guerre au Proche-Orient, ainsi que dans les syndicats ! À force de grand écart entre déclarations pour la Palestine et républicanisme de gauche, LFI et les bureaucrates ne conduisent qu’à des défaites, démoralisant les travailleurs et les jetant dans les bras du RN. Pour un pôle anti-impérialiste dans le mouvement ouvrier français !
Lutte ouvrière a fait de grandes déclarations sur la guerre mondiale qui se rapproche et sur la lutte pour la révolution socialiste. Mais tout cela reste des phrases creuses si, dans le contexte actuel, on refuse de faire de la défense de l’Iran néocolonial contre le mastodonte impérialiste américain et ses sbires sionistes un enjeu central de la stratégie prolétarienne.
LO avait correctement pris position il y a six mois, lors de son congrès (dans la foulée de l’attaque israélienne contre le Liban), « pour la défaite militaire de l’État d’Israël ». On n’en a plus entendu parler. Camarades de LO, pourquoi est-ce que votre direction a fait machine arrière ? Pourquoi refuse-t-elle de prendre position pour l’Iran ? Parce que la défense de l’Iran, gouverné par un régime obscurantiste de mollahs anti-femmes, est moins populaire que celle du Liban, ancien « protectorat » français ? Le régime des mollahs n’a survécu si longtemps que parce qu’il est parvenu à monopoliser les sentiments anti-impérialistes des masses ouvrières et opprimées d’Iran. La seule façon d’unifier contre le régime les travailleurs et les opprimés – les femmes, les minorités nationales et religieuses –, c’est en se battant pour arracher aux mollahs la direction de la lutte contre les impérialistes. Cette tâche sera d’autant plus difficile que les dirigeants impérialistes qui aujourd’hui œuvrent à asservir l’Iran ne font pas face chez eux, donc ici même, à une mobilisation ouvrière pour défendre l’Iran.
Le NPA-R a une posture tout aussi abstraite que LO : « Défendre et organiser l’indépendance politique de notre classe » et « À bas les guerres impérialistes au Moyen-Orient et partout dans le monde ». Il se félicite que « la semaine dernière, des centaines de milliers de manifestants ont défilé dans les capitales européennes, ainsi qu’aux États-Unis pour dénoncer la guerre impérialiste au Moyen-Orient » (éditorial du 24 juin). Mais il y a eu des dizaines de telles mobilisations depuis le début du génocide à Gaza en octobre 2023 ; elles n’ont pas fait bouger d’un iota les impérialistes parce que leur direction travailliste (Grande-Bretagne), mélenchoniste (France), démocrate (États-Unis) refuse catégoriquement de les transformer en mobilisation anti-impérialiste. On ne peut pas se battre pour l’« indépendance politique de notre classe » en maintenant une sorte d’« ambiguïté stratégique » vis-à-vis de la défense de l’Iran face aux impérialistes. Le « pôle des révolutionnaires » que le NPA-R appelle de ses vœux ne peut avoir de signification que par opposition à des républicains impérialistes comme LFI. C’est ainsi que les travailleurs pourront aller de l’avant en défendant l’Iran pour se défendre eux-mêmes.